Origines






D'origine flamande, comme tous les autres dunkerquois, la famille HEDEL a dû choisir l'exil pour fuir les avancées des batailles de la guerre 14/18. 


Ce séjour imposé à sa famille, au Logéo, sur le bord du golf du Morbihan, a néanmoins permis à Gaston HEDEL de remarquer une voisine, Lucie, qu'il demandera en mariage dés la fin de la guerre. 



Pour ce mariage, un oncle gardien de phare leur offrira une représentation du port de Dunkerque réduite, à l'intérieur d'une bouteille, car la réalisation de ces maquettes en bouteille était son activité préférée durant ses heures de veille. Par la suite, ce parent connaitra une mort accidentelle, noyé dans le port de Dunkerque en allant prendre son service.

Mousse dés l'âge de 13 ans, Gaston s'est donc d'abord aguerri dans les vergues des "3 mâts". Après leur mariage, Gaston et Lucie s'établiront à Saint Nazaire car Gaston a ensuite été marin pendant 30 ans sur les paquebots de la ligne St Nazaire/ La Havane. Il ramènera parfois des souvenirs de ses voyages comme cette tête d'indien trouvée à Cuba.


Né en 1920, Gaston HEDEL junior travaillera aux chantiers de l'Atlantique comme chaudronnier pour la construction de bateaux. Durant ses loisirs, il pratiquera assidûment la photographie puis le cinéma amateur. Ainsi, il photographiera en 1945 la maison familiale presque épargnée dans les ruines de la rue Clément Marot durement éprouvée (Saint Nazaire a été détruite à 90% par la seconde guerre mondiale). Comme il a également fabriqué beaucoup de jouets de ses propres mains pour ses enfants ou petits enfants, la seconde photo représente son fils YH au volant de l'auto réalisée par son père.


Gaston HEDEL a beaucoup photographié son beau-père, notamment au milieu de ses petits enfants. A gauche, entre Jocelyne et YH, tenant son las de paludier ou a droite, avec YH dans la charette tirée par sa jument "Rosette".



Très vite, Gaston est également tenté par la pratique du cinéma amateur. Son beau père paludier, Saillé et les marais salants restent néanmoins ses sujets de prédilection. 
Les extraits ci-dessus montrent un portrait d'Hypolite, ainsi que Pauline, fille d'Hypolite, femme de gaston et mère de YH, portant le sel dans une jade (40 kg !) sur la tête.
Hypolite était un grand père très apprécié de ses petits enfants car c'était un excellent conteur qui avait toujours une mystérieuse histoire de personnages (l'Ankou ?) rôdant dans les rues de Saillé ou d'exploits dans les tranchées de Verdun où il était resté 40 mois. Avec son imagination fertile, il adorait lire. Quand YH était en pension chez eux, il dévorait ses livres d'histoire comme ses albums de Tintin & Milou.
Il laisse le souvenir d'un homme heureux car philosophe qui appréciait les journées de solitude dans le vent et le soleil, au milieu des marais salants, accompagné de son chien "Cap".





Le plus jeune des enfants tenus dans les bras d'Hypolite, Jean-Marc a disparu à l'âge de 27 ans. Parti des Antilles en solitaire sur un bateau construit avec l'aide de son frère, Jean-Marc ne reverra pas les côtes bretonnes, puisque son bateau a été retrouvé vide sur une plage de Lorient, après qu'il ait envoyé un dernier message optimiste au large des Glénans, attendant la marée pour entrer au port du Croisic. A l'adolescence, Jean-Marc et YH partageaient leurs promenades dans le port du Pouliguen ou sur les marais ainsi que leurs lectures, JP Sartre, Steinbeck ou A. Camus.


Une pénurie de logement dans une ville dévastée par la guerre incitera Gaston à choisir les "déplacements". Ci-dessus, deux photos sont prise à St Denis, première étape en banlieue parisienne de son itinérance professionnelle. La troisième photo montre YH sortant de l'école primaire de Villers s/ST Leu (Oise), où sa soeur Mireille est née. Ils y ont séjourné durant la durée du chantier de construction de la centrale électrique de Creil, confiée à Alsthom qui employait Gaston H.







Lancement du France à Saint Nazaire





Au fil du temps, cette vie itinérante s'est avérée peu compatible avec le suivi scolaire. A son entrée en 6ème, Yann. a été confié pendant un an à ses grands parents. En semaine, il traversait tous les jours les marais pour aller de Saillé au collège du Pouliguen et passait vacances et fins de semaine à Saint Nazaire où son grand'père lui faisait partager sa passion des bateaux. Ainsi, ils ont assisté ensemble au lancement du "France".
Renonçant aux "déplacements" pour donner un peu de stabilité à sa famille, Gaston Jr trouve un emploi chez Thiriet, sous-traitant des Chantiers de l'Atlantique. Quelques années plus tard, il doit cependant accepter de nouveaux déplacements pour échapper aux vagues de licenciement qui se succèdent alors à Saint Nazaire. Toute la famille habitera un an à La Seyne sur Mer où Yannick suivra une année à l'Ecole des Beaux-Arts. L'année suivante, il sera pensionnaire dans un lycée de Boulogne-sur-Mer quand sa famille résidera à Dunkerque. 
Une amélioration conjoncturelle permettra ensuite à la famille de revenir en Loire-Atlantique et à Yannick de finir sa scolarité dans un Lycée nantais. 





A 22 ans, YH part s'installer à Lyon où il travaille dans des cabinets d'architecture intérieure pour concevoir l'aménagement et les façades de magasins (voir perspectives reproduites). Il entre ensuite au Ministère de l'Equipement, où lui seront confié la conception et l'édition de publications sur l'architecture ou l'urbanisme avant de se consacrer à l'urbanisme règlementaire (conception de POS ou PLU).

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Depuis une quinzaine d'année, YH partage sa vie avec Patricia à Caluire, avec qui il s'est marié en 2007.


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Kieran HEDEL, fils de YH né en 1974, se consacre également au dessin et à la photographie...






Photos argentiques N &B réalisées sur les pentes de la Croix-Rousse par Kieran H. durant ses études au Lycée de la Martinière











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SAINT NAZAIRE,
une ville portuaire sur un estuaire,
Port de St Nazaire avant guerre
La ville de Saint Nazaire a été détruite à 80% pendant la dernière guerre. Lors de l’évacuation de la population civile, la famille HEDEL s’est repliée à Piriac (un petit port de pêche où plus tard décédera à 108 ans la grand’mère paludière, Marie-Louise LEGAL).
Si cette évacuation a limité les pertes en vies humaines, elle n’évitera pas les souvenirs douloureux dans la mémoire nazairienne. Par exemple, Gaston se remémorait souvent ce jeune voisin adolescent disparut lors du bombardement du centre d’apprentissage des Chantiers. Sa mère l’a ensuite longuement appelé en parcourant les ruines, avant d’être happée à son tour par le déferlement du bombardement suivant.
C’est la présence de l’une des plus grande base sous-marine de la façade atlantique qui aura tant coûté à Saint Nazaire… Une forteresse de béton construite entre la ville et le port, à la place du bassin de la Compagnie Transatlantique où embarquait auparavant Gaston (senior) pour rejoindre l’équipe des « chauffeurs », chargés d’alimenter à la pelle les immenses chaudières des Transatlantiques.
Au début des années 50, encore enfant, Yann.H. a beaucoup parcouru la ville à la main de sa grand’mère Lucie, l’accompagnant pour faire les courses. De ces déambulations urbaines à travers les terrains vagues, les ruines et les multiples chantiers de reconstruction, il garde en souvenir des paysages surréalistes, composés de décors chaotiques baignant dans une lumière chiriquienne apportée par l’estuaire et l’Atlantique.

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« ...Je veux parler de Saint-Nazaire ....Assez tragique est l'abord
de cette ville que je me suis toujours imaginée mal ancrée au sol,
prête à céder à je ne sais quelle dérive sournoise ....
Ville impossible comme celles que bâtit l'opium,
aux lisses façades glaciales, aux pavés muets,
aux frontons perdus dans les nuages... »
(…)

« Ce qui frappe, c'est,(... )ranimée, vérifiée à travers une expérience vécue en d'autres années et en d'autres circonstances, l'aptitude particulière d'une ville à fournir indéfiniment, souplement, à l'imagination sollicitée par la poésie, des repères, des modèles et des chemins à donner sur les visions les plus insolites. »


Julien Gracq





"..Comme si la réalité et les apparences
se refusaient perpétuellement à coïncider...
N'est-elle pas une ville plus imaginaire que réelle,
cette ville que les étrangers aveugles jugent trop neuve,
trop carrée, trop froide, trop ventée?
...Ou plutôt, la réalité de Saint-Nazaire n'est-elle pas purement imaginaire,
parce que l'on a tout fait pour tuer sa mémoire,
et que connaître et aimer cette ville, c'est d'abord pratiquer
une archéologie, à travers les bribes
que par mégarde , l'on a abandonnées?...
Cette ville perpétuellement menacée a été reconstruite ailleurs que dans la transparence du présent,
quelque part dans les esprits, quelque part dans l'inquiétude
des expériences passées,
quelque part dans l'incertitude des lendemains...
...Par delà la transparence des choses, la ville est une superposition de souvenirs....

Yannick Guin (Ville imaginaire)